Espace personnel

La création de la crèche Kiehlmann

Pourquoi une crèche « Kiehlmann » ?

Le legs Kiehlmann

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Publication de la Société des crèches, 1906 (AMA, BN 182)

La dénomination de la crèche fait référence à un bienfaiteur de la Ville, M. Jean Frédéric Kiehlmann, d'origine alsacienne, installé depuis 1868 à Auxerre (au n° 35 de la rue Hippolyte-Ribière). Ce rentier décide par deux testaments olographes (13 octobre 1900 et 28 janvier 1904) de faire de la Ville son légataire universel.

Fervent laïque, il souhaite favoriser par son legs le domaine de l'enfance. Voici les termes de son deuxième testament olographe : « 28 janvier 1904. Ceci est mon testament laïque ! ! ! Tout ce que je laisse après ma mort servira à élever des orphelins, dirigé [sic] et surveillé [sic] par la loge le Réveil de l'Yonne »1.

Par délibération en date du 26 mai 1905, le conseil municipal décide d'accepter le legs de M. Kiehlmann, décédé en son domicile le 28 novembre 1904. Il est envisagé dès ce moment d'affecter le legs « à l'établissement de crèches, lesquelles rendraient les plus grands services à la classe ouvrière et que sur ce point il y a adhésion complète de la Loge maçonnique qui laisse à l'Administration municipale la disposition entière du legs Kiehlmann, à la condition qu'il soit destiné a une œuvre concernant l'enfance. »

Quelques difficultés seront soulevées par deux membres de la famille, mais seront résolues moyennant un geste financier. Quant à l'implication de la loge maçonnique dans la future structure destinée à l'enfance, elle laisse finalement toute latitude à la Ville d'Auxerre, pourvu que l'esprit du testament soit respecté.

Ce legs rencontre la volonté sociale et higiéniste de Charles Surugue.

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Image issue du réglement de la crèche de la Ville de Meaux, 1909 (AMA, BN 182)

Dès la séance du conseil municipal du 15 novembre 1904, le maire, Charles Surugue, demande un rapport à l’inspecteur des enfants assistés de l'Yonne relatif à l'établissement et au fonctionnement de crèches à Auxerre.

En 1906, l'inspecteur de l'assistance publique de l'Yonne remet au maire d'Auxerre un rapport sur le projet d'organisation d'une Goutte de lait2 à Auxerre en complément des consultations médicales des nourrissons déjà établies.

Cette même année, la commune lance une enquête auprès d'autres villes visant à connaître le fonctionnement de leurs crèches. Les villes de Rethel, Troyes, Orléans, Montargis, Melun et Meaux sont notamment consultées.

Le projet d'ouverture d'une crèche est porté par un but social, celui de faciliter la vie des femmes qui travaillent. Cet objectif est très clairement exprimé dans la lettre du 25 juillet 1906 de Charles Surugue au maire de Rethel :

« Le seul service que nous voudrions établir maintenant consisterait dans la possibilité donnée aux mères, lorsqu’elles vont travailler soit en ville, soit au champs, de déposer à la crèche leurs enfants, au moins ceux qui ne sont pas encore assez âgés pour entrer dans les écoles maternelles »3.

L'ouverture de la crèche

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Projet d'aménagement d'une crèche dressé par l'architecte de la ville le 20 janvier 1907 (AMA, 1 O 33)

L'ouverture de la crèche se fera en partie grâce aux fonds provenant du legs Kiehlmann. En 1906, les immeubles de l'ancienne congrégation des Augustines sont mis en vente et, parmi plusieurs possibilités, la municipalité décide l'achat de deux lots par adjudication pour y implanter la crèche. Les travaux de remise en état, relativement coûteux selon l'ouvrage de Denise Pineaux4, durent trois ans et la crèche est ouverte le 23 mai 1910 pour les enfants de 15 jours à 3 ans. Dès 1912, 21 enfants sont accueils par jour en moyenne.

En plus de cent ans d'histoire, la crèche municipale a conservé son nom et son emplacement.

 

V. Rousselet/Ville d'Auxerre - 2017

 

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1. Archives municipales d'Auxerre, 2 L 3.

2. Organisation destinée à lutter contre la mortalité infantile notamment en prodiguant des conseils aux familles et en distribuant du lait stérilisé.

3. Archives municipales d'Auxerre, BN 182.

4.Denise Pineaux, Architecture civile et urbanisme à Auxerre, 1800-1914, Impr. Moderne, Auxerre, 1978.